Teo Becher, Hercynienne, 2020-2022
Teo Becher, Hercynienne, 2020-2022
Mathieu Bernard-Reymond, extrait de la vidéo La Flèche du temps, 2018 © MBR / Nasa
Mathieu Bernard-Reymond, extrait de la vidéo La Flèche du temps, 2018.
Loren Capelli, issu de l’album Cap!, éd. courtes et longues, 2019
Loren Capelli, Dessin issu de la résidence au Château de Flamanville, 2024
Mélanie Dornier, de la série Exaucés dans le murmure de l’écorce, 2023 - en cours.
Mélanie Dornier, de la série Exaucés dans le murmure de l’écorce, 2023 - en cours.
Salomé Jashi, Taming the garden, Mira Film, CORSO Film and Sakdoc Film, 92', 2021
Salomé Jashi, Taming the garden, Mira Film, CORSO Film and Sakdoc Film, 92', 2021
Riitta Päiväläinen, de la série Aomori, blue forest, 2005
Riitta Päiväläinen, de la série Aomori, blue forest, 2005
Natalia Romik, Chêne Józef à Wiśniowa, Pologne, 2021
Natalia Romik, Chêne Józef à Wiśniowa, Pologne, 2021, Scan 3D, Przemysław Kluźniak, (ArchiTube), 2022
Yasuyuki Takagi, petite forêt, 2011
Yasuyuki Takagi, petite forêt, 2011

LES SENTINELLES
Figures de l’arbre

Teo Becher, Mathieu Bernard-Reymond, Loren Capelli, Mélanie Dornier, Salomé Jashi, Riitta Päiväläinen, Natalia Romik, Yasuyuki Takagi

Château de Flamanville, Cotentin, Normandie

Du 8 juin au 29 septembre 2024

Déraciné de l’ombre, débranché du ciel, collaborateur estimé d’une société responsable, compagnon de boulevard, patriarche de square, l’arbre n’en est pas pour autant civilisé. Apprivoisé comme individu, il reste sauvage comme peuple (fût-il tenu en bon ordre). […] Le costume trois-pièces lui va aussi bien que la tunique de l’ascète imprécateur. 

Pierre Lieutaghi, L’Arbre qui cache la forêt mère, 1999

 

 

Après la fleur et l’oiseau, voici que l’exposition d’été au Château de Flamanville est dédiée à l’arbre. Si le jardin conservatoire des dahlias et la corbeautière, tous deux présents dans le parc avaient inspiré les précédentes expositions, c’est l’arbre, personnage principal des abords du Château, qui nourrit cette proposition. Ici, le marronnier familier et bonhomme côtoie la silhouette altière du hêtre, à la cime duquel niche le corbeau freux. Dans l’allée clairsemée, l’un se penche aimablement vers le visiteur quand plus loin, là où résonnent d’entêtants croassements, l’autre semble monter la garde pour ses congénères à plumes. Inspirée par ces figures duales, l’exposition propose une incursion dans les imaginaires de l’arbre.

Personnifié, autrefois figure féminine dans l’antiquité grecque et latine, masculine dans les sociétés latines modernes, l’arbre est celui qui, tantôt stoïque tantôt vengeur, recueille et protège, piège et châtie. Parce qu’il échappe à notre entendement et littéralement nous dépasse, parce qu’il nous précède et nous survit, l’arbre, est le réceptacle de nos imaginaires, de nos espoirs et nos craintes. 

C’est l’arbre de l’enfance, la nôtre comme celle du monde, que photographie Yasuyuki Takagi dans l’île de Yakushima et sa forêt vierge ; pénétrez dans sa touffeur et vous aboutirez au dessin du grand arbre de Loren Capelli à l’ombre duquel l’enfant mesure sa propre croissance et grimpe toujours plus haut. Une voix se fait entendre, qui nous conte une histoire d’arbre déraciné à Gap, de pièce de monnaie de la Rome antique et d’anneaux de Saturne, en une vidéo de Mathieu Bernard-Reymond qui relie racines et ciel, profondeurs de la terre et cosmos avec pour intercesseur, ce pin du jardin familial. Déraciné aussi cet arbre que l’on voit flotter en mer, dans le film de Salomé Jashi, sanglé sur un bateau, s’éloignant du village qui l’entourait pour gagner le parc d’un milliardaire en Géorgie. Chez Teo Becher, l’arbre de la forêt de Soignes, tronc, souche et branchages entremêlés, relie le passé antique d’une forêt primaire d’Europe du Nord à l’exploitation humaine contemporaine et ses scories. L’arbre qui s’étire et ouvre grand les bras accueille chez Riitta Päiväläinen d’étranges fantômes et rappellent lesdites loques dont les arbres votifs autrefois se couvraient. Quand en Pologne, nous révèle Natalia Romik, le tronc du chêne Josef se fait le refuge pendant la Seconde Guerre mondiale de deux frères juifs tentant d’échapper aux exécutions. 

Dans le parc du Château, une série de photographies de Mélanie Dornier dédiée aux arbres à vœux se déploie.

Solidement enraciné dans une forêt primaire du Pacifique ou arraché à la place d’un village géorgien, complice tendre pour l’enfant ou refuge pour les persécutés de la guerre, l’arbre est ici sentinelle, tout entier aux aguets. Perméable à tout, à l’eau céleste comme à la folie terrestre, à notre fantasme d’éternité et à notre angoisse de finitude, l’arbre est repère : qui sait, peut-être lui saurait-il comment faire avec cette chose, l’existence ? 

Château de Flamanville
Tous les jours de 11h à 13h et de 14h à 18h
1, rue du Château – 50340 Flamanville
Contact : Mairie de Flamanville
T. 02 33 87 66 66 / communication@flamanville.fr